Rangoon - Lewis street - Commandement d'Air France pour la Birmanie. nous sommes le20 février 1958 ( bientôt 50 ans ! ) et il est 16.00 .
Je discute de transport de fret avec un gros importateur chinois d'optique de précision.
Miss Hirghie , ma sécrétaire trilingue, m'appelle sur mon poste d'intercom.
- Monsieur Le Hénaff, l'Archevèque vous a demandé. Rappelez-le, c'est très urgent.
Je pense: qu'il est convoqué, subito presto, au Vatican.et qu'il va falloir lui trouver
en dernière minute, comme d'habitude, une place pour Rome. Sans plus attendre, je
l'appelle :
-Monseigneur, bonjour, vous m'avez demandé, que puis-je pour vous ?
- Passez me voir à l'archevêché maintenant, si possible. Je vous attends.
- J'appelle mon chauffeur et, dans 10 minutes, je suis chez vous.
Archevêché, des jeunes curés, birmans ou chinois pour la plupart , traînent
dans les couloirs. Bureau de Monseigneur Bazin.
- Bonjour, mon jeune ami, et que Dieu vous garde. Vous allez en avoir bien besoin., je crois. Je tiens
de source sûre que deux de vos assistants et vous mème serez arrêtés par la police d' état pendant
ce week-end. Je ne peux vous dire rien de plus. Voyez ce qu'il vous reste à faire.
Nous étions le vendredi matin. J'avise immédiatement mes deux assistants. Au
premier qui possédait une grosse voiture très rapide et encore en état ( chose rare en
Birmanie ) :
- Rentrez tout de suite chez vous. Faites le plein d'essence et débrouillez vous à passer , avant la
nuit noire, la frontière avec la Thaîland. N'en parlez surtout à personne, mème dans votre famille.
Vous vous rendrez chez xxxx , mon ami représentant de la compagnie à Bangkok. Je le contacte
avant midi. Il sera au courant et vous verrez avec lui ce qu'il convient de faire. Bonne chance et ne
traînez pas. Avant de partir , donnez à Miss Hirghie les coordonnées de votre cousin à New-York. Il
s'agissait de U.Tant , grand patron de l'ONU.
A mon deuxième assistant, un ancien colonel révoqué de l'armée birmane :
- Il est question que vous soyez arrêté pendant ce week end . Récupérez une voiture et allez "prendre
des vacances" quelques jours dans les états shan , avant de passer au Cambodge. Vous contacterez YYYY à la direction de la compagnie à Pnom-Penh qui s'occupera de vous. Je vais l'informer aujourd'hui.pour qu'il sache de quoi il retourne. Filez, bonne chance et n'en parlez à personne mème pas à votre famille. Pour tout le monde, vous êtes en tournée de prospection.
Mes deux collaborateurs ont "mis les voiles". Je me rends à l'Ambassade de France
et expose l'affaire à zzzz , l'ambassadeur. Je lui demande de bien vouloir m'accorder la
protection de l'ambassade dans le cas où la police du Général Newin viendrait
m'arrêter. Réponse :
- Il ne saurait en être question. Je ne veux pas d'histoires avec les autorités birmanes. Débrouillez
vous.
- Merci, Monsieur l'ambassadeur., de m'avoir écouté. Je m'attendais un peu à votre refus et j'ai déjà
demandé le mème service à mon ami l'ambassadeur des USA qui me l'a accordé volontiers.
Ce qui prouve bien, une fois encore s'il le fallait, que lorsqu'on est affecté
dans le sud-est asiatique, dans ces pays un peu troubles, mieux vaut être bien avec
les américains et ne pas perdre son temps avec les spécialistes des ronds de
jambes du Quai d'Orsay.
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